
Il y a des groupes qui murmurent des histoires. Et puis il y a BLACKBRIAR qui les incante. Avec « A Thousand Little Deaths », les Néerlandais nous livrent un troisième album comme une procession gothique où chaque titre sonne comme un conte tragique, parfumé d’encens, de larmes et de velours noir.
Dès “Bluebeard’s Chamber”, on entre dans une pièce interdite : riffs feutrés, orchestrations ombrageuses, et la voix de Zora Cock qui, plus que jamais, oscille entre caresse et malédiction. La chanteuse n’interprète pas seulement ses personnages : elle les habite, les incarne et finit par nous hanter.
Le groupe confirme son savoir-faire en équilibre entre mélancolie romantique et metal symphonique incisif. Là où The Cause of Shipwreck fascinait par ses atmosphères marines et A Dark Euphony par sa richesse orchestrale, A Thousand Little Deaths s’enfonce plus profondément dans le drame intime, flirtant parfois avec le macabre victorien. “The Fossilized Widow” illustre parfaitement cette tendance : une valse funèbre, élégante et tordue, où la folie s’installe dans le murmure d’une veuve figée hors du temps.
Mais l’album ne se complaît pas dans la langueur. “The Catastrophe That is Us” déploie une rage romantique digne des grandes tragédies shakespeariennes, tandis que “Harpy”, en clôture, prend des allures de rituel païen, avec ses envolées quasi théâtrales et une intensité qui frôle le baroque. Entre ces extrêmes, des morceaux comme “Floriography” ou “Green Light Across the Bay” rappellent que BLACKBRIAR excelle dans l’art de tisser des images littéraires en musique, avec la précision d’un bijou gothique.
La production de Joost van den Broek (Epica, Ayreon) se révèle une nouvelle fois exemplaire : ample sans être pompeuse, cristalline sans ôter la patine sombre. Chaque instrument trouve sa place, chaque respiration de Zora devient une incantation.
Alors, que reste-t-il après ces “mille petites morts” ? Peut-être un sentiment paradoxal : celui d’avoir assisté à une œuvre qui nous parle de fin, mais qui confirme plus que jamais la vitalité artistique de BLACKBRIAR. Si le metal gothique se nourrit de contrastes, A Thousand Little Deaths en est une incarnation magistrale, un disque où la beauté et la douleur s’entrelacent jusqu’à devenir indissociables. Un album à la fois funèbre et lumineux, qui élève BLACKBRIAR au rang des conteurs incontournables du metal moderne.
Artiste : BLACKBRIAR
Album : A thousands little deaths
Date de sortie : 22 AOUT 2025
Label : NUCLEAR BLAST records