Il existe des albums qu’on écoute, et d’autres qu’on traverse comme une épreuve initiatique.NIHT, la nouvelle offrande de SOWULO, appartient sans conteste à la seconde catégorie. Faber Horbach, maître de cérémonie solitaire, nous entraîne dans une procession nocturne où le deuil, la perte et l’ombre deviennent les seuls guides. Loin de l’imagerie païenne folklorique et festive que beaucoup associent au néo-folk, SOWULO choisit le chemin du dépouillement et de la gravité. Ici, chaque son est une incantation : le craquement d’une nyckelharpa brisée, le souffle rauque d’une voix d’outre-tombe, la frappe implacable de tambours tribaux. L’auditeur est happé dans une liturgie sans artifices, un espace sonore brut où la douleur se mue en transcendance.
Āsteorfan ouvre le rituel avec une lente agonie, un appel à “mourir avant de mourir” où les harmoniques s’étirent comme des volutes de fumée au-dessus d’un bûcher funéraire.
Vient ensuite Sōl ond Māni, fresque cosmique où la poursuite mythique des astres se transforme en drame existentiel : les voix s’élèvent comme des loups hurlant à la fin des temps, portées par un souffle qui semble puiser directement dans les entrailles de Midgard.
Mais c’est avec Mōnaþblōd que le disque atteint son sommet. La voix incandescente deMicky Huijsmans y transcende la noirceur environnante pour ouvrir une brèche lumineuse dans la nuit, rappelant que toute ombre est fille de la lumière. Une invocation viscérale, presque dangereuse, qui marque durablement l’auditeur.
NIHTn’est pas un disque pour les âmes distraites. C’est une œuvre qui exige le silence, la disponibilité, l’abandon. Elle ne flatte pas, elle convoque. Elle ne divertit pas, elle transforme. Dans une scène saturée de productions formatées, SOWULO ose livrer un album radicalement sincère, qui fait de l’obscurité un territoire de guérison et de puissance. Écouter NIHT, c’est accepter de descendre dans sa propre nuit intérieure. Ceux qui auront le courage de s’y aventurer en ressortiront changés, marqués à jamais par la beauté sauvage de cette cérémonie païenne.