Deux ans et demi après leur premier album studio, « This Too Shall Pass », GRANDMA’S ASHES nous délivre cette année « Bruxism », après avoir signé avec le label VERYCORDS.
Réalisé avec le producteur Canadien Jesse Gander, qui a travaillé notamment pour BRUTUS, et avec Sam Wilkins, ce nouvel opus se veut plus brut dans ses tonalités.
Ce virage va-t-il nous faire grincer des dents ?
“Saints Kiss” ouvre l’album et annonce la couleur avec ses riffs accrocheurs et sa batterie incisive. Alors que « This Too Shall Pass » évoquait des horizons plus éthérés, c’est un univers résolument plus industriel et urbain qui se révèle ici.
“Empty House” est la note la plus légère de l’album, avec ses côtés pop énergétique / new wave, très 80s dans ses sonorités à la guitare ou dans la voix d’Eva. Et pourtant s’opère un changement à la fin du titre, comme un rideau qui s’ouvre sur une vérité qu’on avait cherché à dissimuler.
Ce premier pas vers la vérité est révélé par « Sufferer” – premier single de l’album dévoilé en juin dernier – et marque une première rupture dans l’écoute. Une rage se dégage dans ce titre, une rage qu’on peine à exprimer tant on est oppressé. “A fawn in the wild, naïve as a child / Knees weak, head down, down / I despise myself for being so kind” chante Eva. Le titre se termine par une fin douce-amère, comme une acceptation face à ce qui nous attend derrière le rideau, pour s’enchaîner sans répit avec “Nightwalk” et une longue plainte d’Eva, pour nous sortir de notre torpeur. “I just want to go on a Nightwalk with you”, ce vœu sera-t-il réalisé ?
« Flesh Cage” réduit ce doux rêve à néant, avec ses sonorités brutes, épurées, avec une basse très “grunge”. Un interlude instrumental très enveloppant nous induit en erreur car c’est en growlant qu’Eva termine le titre. Dans l’esprit, ce titre me rappelle “Someone’s In The Wolf” de Queens of the Stone Age (Lullabies To Paralyze – 2005). Frissons garantis !
Changement total d’ambiance avec le titre “Neutral Life Neutral Death”, beaucoup plus doux, où j’ai du mal à retrouver la voix transformée d’Eva, qui nous demande “Are you afraid to die? I am not”. Il me faudra plusieurs écoutes pour mieux appréhender ce titre, enfermé entre deux gros morceaux, puisque vient ensuite le morceau le plus fort du disque selon moi, “Cold Sun Again” – sorti en deuxième single pour annoncer l’album à venir.
On sent un gros travail d’Eva sur sa voix pour nous offrir des textures inédites par rapport à ce qu’elle nous avait habitués, notamment sur le refrain. Ce titre est à mon sens l’accomplissement parfait du travail de l’ensemble du trio pour cet album, Eva au chant et à la basse, Edith à la batterie et Myriam à la guitare, tout en gardant l’association de leur voix pour nous susurrer “Closer again / Closer my friend”.
Une ode au lâcher prise, à la confrontation avec ses démons et à l’acceptation de notre part d’ombre. Le titre est sublimé par un clip somptueux, en parfaite résonance avec l’atmosphère du morceau.
Les deux titres suivants, “Calix” et “Duality” sont emprunts d’une douce nostalgie, parfaits pour reprendre nos esprits avant le final.
L’album se termine sur le titre “Dormant”, balade qui débute à la guitare sèche. C’est la fin du conte écrit et raconté par GRANDMA’S ASHES. Notre esprit dérive, nous fermons les yeux pour apprécier les envolées lyriques d’Eva.
Encore une fois, nous sommes dupés. Le morceau s’emballe, nos pulsations s’accordent aux percussions d’Edith, déviant presque jusqu’au blackgaze. Les growls d’Eva lacèrent la chanson, une métamorphose s’opère et le loup sort de sa cage. Le morceau s’achève comme une déflagration, une apothéose sauvage et libératrice.
Quand arrivent les dernières notes, on finit sonné, le souffle court. Que reste-t-il après ? On regarde autour de soi, il n’y a qu’une terre brûlée. Le silence est pesant et l’on se découvre seul, face à soi-même.
Alors, il faudra remettre le disque. S’y replonger et traverser de nouveau chaque étape, jusqu’à ce que l’acceptation s’impose, douce et inexorable.
« Bruxism » est un disque tout en tension, le plus brut jamais sorti par le groupe. On reconnait évidemment la patte fondatrice du trio, mais il y a une volonté de sortir des sentiers battus. Un soin particulier est pris pour amener chaque morceau à son paroxysme, grâce à un travail harmonieux et dramatique sur la voix et les instruments, sous la direction de Jesse Gander.
GRANDMA’S ASHES nous offre un album qui livre ses intentions sans détour. Il fait écho à l’anxiété actuelle ressentie par nombre d’entre nous, assortie d’un sentiment de dépouillement et de solitude face à une époque qui s’emballe et nous perd. Se pose le dilemme de nos possibilités d’y répondre, n’y a-t-il qu’une voie unique ?
GRANDMA’S ASHES entame cet automne une grande tournée dans toute la France, les conduisant jusqu’à l’Elysée Montmartre le 28 mars 2026, en compagnie de SUN.
Artiste : GRANDMA’S ASHES
Album : Bruxism
Date de sortie : 24 octobre 2025
Label : VERYCORDS
