
FANALO, directeur du CIAM à Bordeaux vient de sortir, le 28 février 2025, son 1ᵉʳ album studio. Nous revenons avec lui sur les envies qui l’ont poussé à se lancer dans cette aventure de composition et d’enregistrement seul.
On va commencer par une petite question simple, Fanalo, qui es-tu ?
Je suis un guitariste et artiste de Rock basé à Bordeaux. Je joue depuis 35 ans (!) de la guitare et je suis fan de rock et de métal depuis lors. Après avoir écumé pas mal de groupes tout au long de ma carrière (notamment Plug-in qui avait sorti l’album Hijack en 2010), je reviens aujourd’hui à la compo en sortant aujourd’hui mon premier album solo, sous mon propre nom.
La genèse du projet …?
Après Plug-in qui s’est mis en veille en 2014, j’ai eu un peu de mal à définir ou je voulais aller d’un point de vue créatif. Après de nombreuses années à faire de la musique instrumentale tournée vers la guitare, j’avais besoin d’autre chose et de réaliser ce qui me tenait vraiment à cœur, à savoir écrire de bonnes chansons avec un chanteur. J’ai essayé plusieurs fois de m’y atteler, mais non seulement j’ai eu du mal à trouver la bonne personne, mais j’ai surtout été empêtré dans des questions existentielles qui entravaient mon projet : musique instrumentale ou chantée, DREAM THEATER ou PEARL JAM, jouer vite ou jouer lentement, rock ou électro… Autant de questions inutiles auxquelles je croyais, à tort qu’il me fallait répondre. Du coup, je me suis mis en veille du point de vue de la compo et je suis parti m’amuser avec des copains dans des tributes bands de MAIDEN et VAN HALEN. En 2019, après plein d’expériences fort sympathiques avec ces groupes, j’ai quand même eu la sensation d’avoir fait le tour de la question et ai ressenti le fort besoin de revenir à mon truc. J’en avais un peu marre de porter le costume de quelqu’un d’autre. Je me suis alors dit qu’on se foutait complètement de tout ces soi-disant-choix à faire, et j’ai décidé de m’enfermer pour me vider de mes idées musicales, en m’autorisant à faire ce qui me venait sans me poser de questions. Et voilà le résultat dont je suis très heureux.
Un album solo, qu’est-ce que ça implique ?
Ça peut paraître bête, mais cela implique avant tout d’être soi-même, pleinement, et de ne se poser aucune question, juste libérer la musique, sans a priori, sans jugement déplacé. Ne se fixer aucune limite, aller au bout de ses idées et de son intuition, avec les moyens du bord et y aller à fond, pour réaliser le plus dur : aller au bout !
Est-ce qu’un projet solo, c’est une manière de répondre à une importante exigence envers son travail ? Savoir que l’on n’est jamais « si bien servi que par soi-même »…?
Ce n’est pas aussi trivial que cela. Il y a plein de musiciens qui auraient fait aussi bien que moi sur l’album, même carrément mieux, mais c’est surtout le besoin d’aller au bout de soi-même et de ne pas s’égarer. Le fait de collaborer avec des gens est un super apport, un vrai partage, mais si on ne se connait pas ou que l’on ne s’assume pas totalement, on peut facilement s’égarer en route. Cette introspection est un excellent moyen de se retrouver face à soi-même, de sortir de l’impasse classique “je ne trouve pas les gens…”. En sortant de cela, on est plus abouti, on a un objet concret qui apporte un repère factuel qui permet justement de se présenter aux autres et de “trouver les gens”. Pour ma part, je vis merveilleusement bien le fait d’être ressorti de ma grotte avec cette musique et de voir que ce projet est de moins en moins un projet solo, du fait du nombre de personnes formidables qui s’y sont ralliées.
Qu’est-ce qui t’a le plus plu dans cette expérience ?
De prime abord, je dirais avoir mis en recul le guitariste pour laisser de la place à l’artiste. J’ai adoré jouer de tous les instruments, libérer une vision étendue de mes compositions. Je crois que ce que j’ai le plus aimé a été de jouer de la basse. C’est un instrument formidable qui m’a vraiment permis d’amener de la vie aux chansons. Dès que la basse était posée, les chansons prenaient vie. De plus, bien que mon home studio soit TRÈS rudimentaire, on a la chance aujourd’hui d’avoir une multitude d’outils créatifs à notre disposition et j’ai adoré explorer et tirer le maximum de tout ce que j’avais. Néanmoins, comme je le disais, cela peut être aussi submergeant et créer de l’égarement. Il faut rester posé, et garder les idées et les accidents heureux au centre de l’attention. J’ai adoré ouvrir la porte à tout cela, et aujourd’hui, le résultat me récompense et m’a permis d’atteindre une version fidèle de moi-même.
Dans Hate 4 Sale, j’entends James Hetfield, j’entends The Unforgiven, dans Isolation,
j’entends Pearl Jam… de nombreuses influences musicales …?
Oui. Comme je le disais, j’avais toute cette musique et ces sons en moi, mais je croyais que je devais choisir entre le côté progressif que j’aime beaucoup, et le côté plus brut, organique et sauvage. Mais comme je l’ai dit, j’ai fini par m’autoriser à n’en avoir “rien à foutre” et tout laisser sortir. Le résultat est cet album, et c’est cette multiplicité qui aujourd’hui me ravie. De plus, du fait de mon lâcher prise, je crois que ces influences variées cohabitent au final plutôt bien, et qu’à l’arrivée, tout sonne “comme moi”. Pour moi, un des meilleurs exemples de cela est le morceau “Isolation” que je qualifierais de chanson punk progressive !
Peux-tu nous rappeler les musiciens qui t’accompagneront sur le live ? Comment les as-tu choisis ?
Pour constituer le groupe, j’ai avant tout réuni des amis, des gens qui me connaissent depuis longtemps et avec lesquels je me sens bien, tant du point de vue musical qu’humain. Il me fallait aussi des gens compatibles, complémentaires, et avec lesquels je pouvais partir sur la route de manière sereine et joyeuse. Évoluant dans ce milieu depuis pas mal d’années, j’ai la chance d’avoir un vaste réseau parmi lequel il n’a pas été très compliqué de choisir. À la batterie, il y a Romain Vicente. C’est un des anciens stagiaires de mon école, le CIAM, qui a aujourd’hui une expérience solide et une vision de la musique que j’apprécie. Romain a vécu en Angleterre et en Allemagne, et sa culture le rend très disponible pour les projets de création et la manière de s’y prendre pour développer le business qui va avec. Par delà ces aspects, c’est un garçon très bienveillant et humain, et par delà le fait qu’il fut jadis mon padawan, c’est devenu un ami proche, ce dont je suis heureux. À la basse, il y a Yoann Roy. Yoann est un professionnel aguerri, qui joue dans le groupe NIHIL, mais est aussi un pro de l’orga et de la route. C’est un vrai bassiste de rock, solide et passionné, et à la culture assez infaillible. Je le connais depuis 20 ans et nous avons passé ces années à nous échanger des références et des anecdotes. Nous avons souvent essayé de bosser ensemble sans jamais aboutir et aujourd’hui, enfin, nous y sommes. À la guitare, il y a Nicolas Dupont. Lui aussi est un ancien stagiaire du CIAM. C’est un guitariste formidable, très inspiré et incroyablement fiable. Dès que je ne me rappelle plus ce que j’ai joué sur l’album, je n’ai qu’à le lui demander, lol. C’est un humain formidable, un de ces stagiaires dont je suis immensément fier, et aujourd’hui, j’aurai bien du mal à te dire qui est le prof de qui ! J’espère que nos concerts à venir permettront de montrer quel formidable musicien il est. Et de plus, il est temps que le monde le sache : c’est lui Buckethead… Au clavier, il y a l’incontournable Manu Martin qui épaule aussi depuis 25 ans Patrick Rondat. Je le connais depuis cette époque. C’est un musicien incroyable à tout point de vue, tant au clavier qu’au chant, mais aussi comme arrangeur. Ce mec a dirigé le London Symphonic Orchestra à Abbey Road. Ça veut tout dire ! C’est un pilier et surtout, c’est un ami comme on en a peu. Enfin, au chant, il y a Christophe Ithurritze. Je l’ai rencontré par mon boulot, et Christophe m’a permis de revoir complètement ma vision du professeur de conservatoire. C’est mon alter ego du service public (rire). Comme moi, il a formé des milliers de musiciens, et c’est un pédagogue formidable, pour lequel l’amour de la musique est sans fin. Nous sommes très rapidement devenus des frères et avons énormément en commun. Nous sommes la preuve vivante que la séparation des conservatoires et des structures privées est une vraie connerie, LOL. Nous parlons pédagogie et musique depuis 20 ans, et pour moi, il était impossible de sortir cet album sans lui. Nous avons co-réalisé la chanson Rise qui est une de mes préférées. Il y a fait un travail formidable, et je crois que je lui ai permis de libérer le rockeur qui est en lui à la face du monde. C’est lui qui sera sur la route avec moi, et vous verrez que quel que soit le chanteur d’origine, Chris assure dans tous les cas. Là aussi, l’avoir à mes côtés est un accomplissement mutuel formidable dont nous profitons pleinement. Petite anecdote au passage : c’est Lisa, la fille de Christophe qui a réalisé la totalité de la facette graphique du projet (logos, visuels, pochettes, clip). Elle est formidable, et l’album pourrait être de ce point de vue, un album duo car si j’ai porté la musique, elle est indéniablement la charpente de tout l’univers visuel qui m’était indispensable.
Merci d’avoir pris le temps pour cette interview !