
IGORRR, le groupe le plus barré et baroque de l’Hexagone, fait son grand retour en ce mois de septembre avec son cinquième album « Amen ». Au fil des années et des albums, l’architecte derrière le projet, Gautier Serre, s’est forgé un monde complètement fou et dérangé qu’il retranscrit en musique. Actif depuis quasiment vingt ans, le projet était, à la base, principalement électronique et s’est progressivement ouvert à d’autres styles pour aujourd’hui résulter en cette entité protubérante exaltant par tous ces ports une folie et excentricité sans commune mesure. Pour ce nouvel album, il est important de notifier que les voix qui ont forgé et donné une identité à IGORRR n’apparaissent plus sur « Amen ». En effet, pour diverses raisons personnelles, Laurent Lunoir (growl) et Laure Le Prunenec (chant clair) ont décidé de partir après l’album « Spirituality and Distortion ». C’est donc JB Le Bail (growl) et Marthe Alexandre (chant clair) qui ont la lourde tâche de passer derrière ces voix qui ont véritablement donné corps à IGORRR.
Il est toujours difficile de parler de la musique d’IGORRR tant elle se veut totale et sans limite. Parler d’expérience à l’écoute d’un album peut paraître cliché mais pour le coup cela s’applique parfaitement dans ce cas particulier. On ne sait jamais sur quoi nous allons tomber car tout est possible avec Gautier Serre et son orchestre. C’est d’ailleurs fascinant de voir un groupe aussi particulier réussir à fédérer autant de monde. De prime abord, IGORRR semble tout aussi fouillis et ridicule tant par ses noms de morceaux comme « Kung Fu Chèvre », « Parpaing » ou « Blastbeat Falafel » que par le côté excessif de ses compositions. Et puis, nous constatons tout le sérieux dans les compositions et l’attention prêtée aux détails rendant IGORRR d’une richesse, profondeur et honnêteté sans pareille.
Pour ce cinquième album, Gautier Serre s’est encore dépassé. « Amen » a la lourde tâche de passer après l’exceptionnel « Spirituality and Distortion » que je considère comme son magnum opus. C’était un album à l’ambition démesurée et qui, grâce à la folie de son chef d’orchestre, réussissait à être tout aussi épique que intimiste. Déjà, si je devais comparer ce nouvel album avec son prédécesseur, à l’écoute de « Amen », on sent qu’IGORRR a resserré son propos. Attention, il y a encore beaucoup d’expérimentations et de mélanges stylistiques mais en comparaison, « Spirituality and Distortion » avait cette exubérance que « Amen » possède de façon plus contenu. “Amen” est beaucoup plus direct dans son écriture et sa production. En définitive, il est plus métal et métallique que les derniers albums et je dois dire que c’est assez déroutant aux premières écoutes car l’ensemble paraît plus simple et accessible. En effet, avec IGORRR, je m’attends à être submergé de sonorités et à des façons de composer totalement déroutantes. Sur « Amen », on reste un peu dans une certaine continuité des derniers opus mais sans l’exubérance d’avant. Même sur certains morceaux, j’ai du mal à retrouver le charme d’IGORRR. « Mustard Mucous » par exemple, le morceau est bien sympathique mais reste plutôt sage au final et me laisse un peu sur ma faim. Et c’est un peu comme ça sur l’ensemble de l’album. Il y a pas mal de moments où cette folie exubérante se fait toujours autant ressentir comme sur le génial « Blastbeat Falafel » ou « Limbo », mais elle est trop souvent étouffée par d’autres passages plus simples, sages et relativement peu inspirés pour du IGORRR.
Je suis assez mitigé vis-à-vis de ce « Amen »… En effet, l’écoute de ce dernier est agréable et la réécoute l’est tout autant mais j’ai du mal à accrocher véritablement à ces nouvelles compositions. J’ai du mal à retrouver le IGORRR qui m’avait tant bouleversé avec ces deux albums précédents tant le cadre qu’il s’est donné est beaucoup trop petit et pas à la hauteur de son talent….
Artiste : IGORRR
Album : Amen
Date de sortie : 19 septembre 2025
Label : Metal Blade Records